Qui sont ces jeunes accompagnés par Le Rocher ?
Nous accompagnons des jeunes scolarisés du CP à la terminale, qui habitent les quartiers où l’on est implanté et qui, avec ou sans leurs parents, demandent de l’aide pour les soutenir dans leur scolarité.
Ainsi nous pouvons faire de la prévention à travers l’accompagnement à la scolarité et le suivi de ces jeunes.
L’autre accompagnement est destiné à des jeunes qui sont en décrochage scolaire, âgés de 14 à 20 ans, ceux qui ont quitté l’école de manière précoce sans avoir de diplôme et qui ne travaillent pas, qu’on va appeler les « grands jeunes ».
Quels sont les principaux problèmes auxquels sont confrontés ces jeunes ?
On confond souvent décrochage scolaire et délinquance. En réalité, derrière ce terme, il y a de multiples situations : des jeunes en situation de handicap, ayant des difficultés d’apprentissages, ou encore des adolescents très timides ou accros aux écrans, repliés chez eux. Cependant, l’ennuie, l’errance et le sentiment d’impuissance, associés à une certaine immaturité permet pour bon nombre d’entre eux des comportements d’incivilité voire l’adhésion à des réseaux de trafic illicites.
Un décrocheur est un jeune qui est privé du lieu principal de socialisation et d’épanouissement : l’école. Ces comportements dangereux pour les autres et pour eux-mêmes sont la manifestation de leur souffrance et de leur isolement.
En travaillant sur deux aspects : l’estime de soi et l’appartenance à un groupe, nous pouvons espérer entrevoir ensemble un avenir joyeux.
Pourquoi ces jeunes « décrochent »-ils selon toi ?
En fait, ce que je vois — et ce que confirment de nombreuses études — c’est que le décrochage scolaire n’est jamais dû à un seul élément, c’est multifactoriel, surtout lorsqu’un jeune est déjà fragilisé par un contexte familial difficile. Les études montrent que plusieurs causes viennent se cumuler : un retard scolaire précoce souvent lié à un environnement familial peu francophone, ou peu familier avec le système éducatif français, une insécurité quotidienne faite d’expositions à la violence du quartier ou familiale, accompagnée d’une précarité économique.
Heureusement, malgré un contexte très complexe les jeunes restent acteurs de leur existence et lorsque c’est possible, peuvent saisir des opportunités pour tenter de changer le cours des choses.
Face à ce constat, quel est l’intérêt des séjours de rupture mis en place au Rocher pour ces jeunes ?
Une fois que ces jeunes sont dans un cadre où ils n’ont pas besoin de se battre pour vivre, il y a une forme de douceur, notamment chez les garçons, à laquelle on ne s’attend pas forcément, une attention l’autre et tellement de joie dans le quotidien passé ensemble !
Il faut se dire qu’ils ont l’habitude de faire ce qu’ils veulent, et là, on se retrouve sur un équipage avec un cadre et des règles et ils l’acceptent. Ils choisissent de prendre sur eux pour vivre quelque chose l’ordre de la fraternité ensemble. C’est dans ce contexte, que l’on peut voir le jeune expérimenter une autre forme de liberté et retrouver l’envie d’y croire à nouveau, de construire quelque chose.
Les séjours de rupture au travers de la nature permettent un retour à soi, une prise de recul qui provoque une meilleure compréhension de leur situation et de ce qu’ils souhaitent pour leur avenir.
C’est loin de leur cadre habituel, que les jeunes apprennent à rêver à nouveau et trouve les ressources nécessaires pour affronter les défis qui les attendent.
Pourquoi partir avec seulement 5 jeunes, cela peut paraitre peu ?
Il est difficile de réaliser le temps et l’investissement que nécessite la sortie d’un cycle d’échecs, pour reconstruire leur confiance en eux, en la société, en l’avenir. Ces jeunes ont souvent eu des trajectoires dramatiques qui se jouent depuis leur petite enfance, des difficultés qui n’ont fait qu’augmenter depuis 10 ans. Il ne suffit pas de trouver le bon travail il y a des choses profondes à réparer, des choses à reconstruire, et ça demande beaucoup de temps.
Nous croyons que ces jeunes qui démarrent un chemin de reconstruction sauront, fort de leur expérience être des relais pour les plus jeune et une source d’espoir pour beaucoup d’autres.
C’est pour cette raison que cette année, nous continuons cette expérimentation des séjours de rupture par la voile, en l’étendant à un groupe de filles, également désireuses de se projeter dans l’avenir, avec de nouveaux enjeux propres à leur réalité.
“Malgré un contexte très complexe les jeunes restent acteurs de leur existence et peuvent saisir des opportunités pour tenter de changer le cours des choses.”
Blandine, Chargée de lutte contre le décrochage scolaire au Rocher