Durant l’été, l’antenne de la Beaucaire (Toulon), a fait le pari de partir une semaine en vacances à Nîmes avec plusieurs familles du quartier, soit un total de 30 participants ! L’occasion rêvée pour tisser des liens forts lors de moments privilégiés, et de construire des ponts entre 2 mondes.
« Et toi, ton été ? », « Alors, qu’as-tu fait ? » Les questions fusent en cette rentrée… Dans notre quartier, l’interrogatoire se résume souvent à : « Es-tu allé au Bled ? ». Si oui, le vacancier se lance dans un long récit ponctué de mille anecdotes ; autrement la réponse est succincte, et on devine vite que la famille est restée, souvent avec un grand sentiment de solitude, dans cet univers de béton. Le Rocher veut offrir une alternative, la joie de pouvoir partir quelques jours en France, avec d’autres, loin des tracas du quotidien. Cet été, nous avons proposé notre camp à cinq familles afin de permettre des relations personnelles entre chaque participant. Nous ne sommes pas un club de vacances, simplement quelques-uns à vouloir vivre un temps fort avec nos voisins de quartiers.
Désormais, ces familles se verront différemment
Lors de l’inscription, – au moment d’oser l’aventure, chaque participant a signé une charte l’engageant à ne pas critiquer les autres et à prendre part à toutes les activités. Chacune des familles nous a fait part alors de son appréhension de partir avec untel ou tel autre. Car, dans la cité, véritable village, tout le monde se connaît sans vraiment se connaître, et la peur liée aux conditions de vie vient souvent menacer la confiance entre les habitants. Pourtant la grâce du Rocher opère et chacun fait le pari de venir, touché de faire partie cet été des ‘‘privilégiés’’ qui séjourneront avec nous. Mais nous sommes les plus chanceux d’entre eux ! Quelle joie immense de « se risquer » nous aussi, en vivant nos premiers jours de vacances avec eux ! Durant le camp, chaque journée se concluait par un moment privilégié entre adultes afin de partager ce qui nous avait le plus touché. Imaginez : dans la campagne nîmoise, sous le ciel étoilé du mois d’août, une femme confie à une autre : ‘‘Tu sais Françoise*, j’avais peur de partir avec toi, et je réalise qu’ici, en dehors du quartier, j’apprends à te voir autrement. C’est ma plus belle surprise de la journée. Je réalise que nous avons tous une sacrée carapace à la Beaucaire, on n’a pas le choix, faut se protéger, mais ici on est sans doute nous tous un peu plus nous.’’ Une autre femme plus discrète ce soir-là, me dira, les yeux embrumés de larmes, la voix un peu cassée : ‘‘Tu sais Inès, moi aussi, je n’avais aucune envie de partir avec d’autres, si je me suis inscrite au camp du Rocher c’était pour l’équipe et mes enfants, j’avais si peur… c’est tellement beau ce que l’on vit ici ’’. Ces familles, au-delà de quelques jours de vacances vécus ensemble, se verront différemment dans le quartier désormais.
Se parler et soulager les maux
Pour nous, l’équipe du Rocher, l’enjeu du camp était de partager à ces familles ce que nous avons, pour la plupart, la chance de vivre dans nos familles : quelques jours à la campagne, portables éteints pour accueillir les moments présents. Notre séjour était ponctué de promenades, grandes tablées, découvertes des traditions de la région, jeux parents-enfants pour resserrer les liens, conseils de famille pour prendre le temps (si souvent volé par les tâches du quotidien) de se parler et de poser les mots pour soulager les maux. Avec 30 participants, le défi était de taille ! Mais rien n’a entamé la bonne humeur, tout le monde se sentant si gâté d’être là. Les habitants nous ont stupéfaits par leur gratitude, les volontaires, eux, nous ont bluffés par leur sens du service et de l’investissement.
Finalement, c’est simple de partir en vacances avec des personnes si différentes lorsque chacun a le désir d’accueillir l’autre tel qu’il est. Souhaitons qu’en cette rentrée, les merveilleux souvenirs de cet été adoucissent les peurs des habitants revenus dans leur quartier !
Inès et Nicolas
responsables de La Beaucaire 2015-2018